De moi, vous dire..

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Paris, France
Ma vie, c'est du bonheur à ne plus savoir qu'Enfer. Journaliste littéraire et culturelle pour le BSC News Magazine, je suis une passionnée, amoureuse de la vie et boulimique de mots. Ceux que je dévore à travers mes très nombreuses lectures, et ceux qui se dessinent et prennent vie sous ma plume. Je travaille actuellement à l'écriture d'un roman, d'un recueil de poèmes ainsi que d'un recueil de tweets. A mes heures perdues, s'il en est, j'écris des chansons que j'accompagne au piano. Mon but dans la vie ? Réaliser mes rêves. Work in progress... LES TEXTES ET POÈMES PRÉSENTS SUR CE BLOG SONT PROTÉGÉS PAR LE CODE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE (COPYRIGHT).

26 déc. 2013

'Afrique Terre sauvage', Alex Bernasconi


Il arrive parfois qu'en guise de livre, on se retrouve avec un bijou dans les mains. A peine l'écrin ouvert, on découvre à quel point le contenu est précieux, comme quelque chose qui, d'un seul regard, vient capter bien plus que notre attention.
Cet ouvrage exceptionnel nous dévoile ce que l'Afrique a de plus intime, des instants pris sur le vif d'une nature libre et sauvage. Une nature pour laquelle Alex Bernasconi - photographe au talent artistique indéniable - a autant d'admiration que de respect.
C'est un voyage hors des sentiers battus, là où la faune sauvage peut laisser libre cours à ses instincts dans des paysages d'une incroyable diversité, aux quatre coins d'un continent auquel il voue un véritable amour. 
Les photographies sont d'une beauté à couper le souffle. D'une infinie sensibilité et souvent spectaculaires, elles nous plongent dans une proximité bouleversante et unique avec l'animal. Chacune d'elles pourrait faire l'objet d'une chronique propre tant l'émotion qu'elles contiennent est puissante et nous ramène à l'essence même de la vie. Chaque photographie est un voyage à elle seule, un cadeau précieux, une ode féérique à la nature sauvage dans ce qu'elle a de plus intime et de plus pur, dépourvue de tout artifice, préservée de l'homme et de son insatiable quête de profit. Mais pour combien de temps encore ?...
Car derrière chacune de ces photographies, au-delà des longues heures de patience et de persévérance, des risques et de l'audace qui se cachent, également l'inquiétude - en filigrane - d'un patrimoine de plus en plus menacé par la modernisation, et la pollution et la destruction de l'environnement qui lui sont inhérentes.
"Le contraste saisissant entre le milieu dans lequel nous avons l'habitude de vivre et celui que nous mettons en péril m'incite à photographier et à immortaliser le monde naturel."
Et l'on devine aisément la complexité d'une telle entreprise où ce sont l'animal et la nature qui décident où, quand et comment, imposant au photographe d'être au rendez-vous. Des rendez-vous parfaitement honorés par Alex Bernasconi qui nous livre ici une formidable palette de couleurs et d'émotions, résultat - ainsi que l'exprime avec justesse Saba Douglas Hamilton dans la préface - de "l'étrange jonction entre la chance, l'instinct et le talent."
L'émerveillement est à chaque page.
Ce livre est une œuvre d'art, rien de moins.

Mélina Hoffmann
Chronique publiée dans le BSC NEWS MAGAZINE de Décembre 2013.

31 oct. 2013

'Rompre avec nos rôles, l'éloge d'être soi', Sarah Seriévic


"[…] Tant que nous n’avons pas renoué avec ce qui vibre à l’intérieur, nous sommes réduits à un rôle, un chiffre, un numéro, un bon exécutant ; c’est oublier que notre plus grande souffrance ne vient pas de ce que nous avons ou de ce que nous n’avons pas, mais de ce que nous ne sommes pas. Nous ne pouvons pas être libres dans le déni de qui nous sommes et c’est peut-être cette liberté qui nous fait tellement peur. "

Être soi-même, cela sonne comme une évidence. Quoi de plus complexe pourtant, de plus effrayant parfois, que cette rencontre avec soi ? Tout un apprentissage à faire en réalité. Un apprentissage nécessaire si l'on veut s'épanouir dans une vie qui nous ressemble, loin du chemin que nous a plus ou moins consciemment tracé notre entourage proche, nos parents, la société, l'environnement dans lequel nous avons grandi et sur lequel nous avançons machinalement.
Une fois adulte, il nous faut en effet faire le tri, nous libérer de nos rôles et reprendre en main les rênes de notre vie. Une entreprise difficile dans la mesure où elle implique de nous aventurer hors de notre zone de confort, et d'aller parfois à l'encontre de la volonté de nos proches et des espoirs qu'ils avaient fondés en nous.

Être en accord avec soi-même et ses désirs profonds est l'une des conditions - si ce n'est LA condition - essentielles au bonheur.

« Nous ne vivons pas en fonction de la conscience que nous avons de nous, mais dans l’idée de nous faire apprécier par ceux qui nous entourent. Cela nous rend d’une part dépendant du désir des autres et d’autre part, nous rend prisonnier de toutes sortes de séductions qui nous coûtent la vie. »

Sarah Sérievic nous invite à nous poser des questions essentielles pour retrouver le chemin de nos propres besoins et désirs. Elle nous fait partager son expérience de thérapeute au gré de situations vécues avec ses propres patients, mais aussi au travers d'expériences plus personnelles. Des situations toujours très révélatrices et symboliques qui illustrent parfaitement l’esprit de ce livre.
Elle insiste sur la nécessité de prendre régulièrement du recul face aux évènements de la vie afin d’en tirer les meilleurs  enseignements, mais aussi sur l'importance de la thérapie qui permet de libérer notre esprit d'émotions bloquées dans notre subconscient,

Par le biais d'exercices de réflexion, l’auteur nous invite à nous réapproprier nos émotions, à décoder nos sensations, à exprimer notre ressenti, à modifier le regard que nous portons sur les choses et à développer des pensées positives. Savoir tirer le positif de chaque situation permet de les rendre constructives, de transformer les échecs en expériences, sans quoi ils reviendront sans cesse parasiter notre vie et nos relations avec les autres. Elle nous apprend beaucoup sur notre propre personnalité, nos peurs, nos désirs, sur les vertus thérapeutiques de l'amour aussi.

« On ne peut pas être absent de soi-même et présent aux autres ».

L'amour, la confiance, le respect, l'estime que nous offrons à l'autre ne peuvent être authentiques que si on les ressent d'abord sincèrement pour soi.
Ce cheminement vers soi demande de la persévérance et de nombreuses prises de conscience. Il demande aussi d'oser, oser s'aventurer vers l'inconnu et ces zones non encore explorées de notre être profond, oser ne plus répondre à certaines attentes de notre entourage ou de la société, oser aimer et dépasser nos peurs. Mais cela en vaut la peine si l'on souhaite mener une vie harmonieuse, en accord avec nos valeurs et désirs profonds.

Car le bonheur n'est pas dans le paraître, la possession ou le regard des autres.
Le bonheur est enfoui en nous, sous toutes ces choses qui nous sont finalement extérieures.

Mélina Hoffmann

Chronique publiée dans le BSC NEWS MAGAZINE d'Octobre 2013.

7 oct. 2013

'Une larme m'a sauvée', Angèle Lieby



« Les jours ont passé. Je me suis réveillée, mais la nuit ne m'a pas quittée. Le savent-ils, les médecins, Ray, Cathy, que je suis de retour ? Tout est calme. J'entends cette respiration et ces bruits de machines en permanence, j'entends des voix régulièrement, mais elles ne me parlent jamais. J'ai l'impression que l'on m'ignore. D'être là sans l'être vraiment. Ou plutôt d'être présente sans que les autres le sachent, comme un fantôme... (…) Je suis parfaitement éveillée, et ils me croient dans les limbes de l'inconscience. »

Imaginez... Vous êtes allongé dans un lit, vous ressentez les sensations. Toutes. Mais votre corps ne vous répond plus, incapable du moindre mouvement. Imaginez... Vous souffrez, tout votre être hurle intérieurement sa douleur. Mais vous êtes dans l'incapacité totale de communiquer. Imaginez... vous venez de retrouver la lumière du jour, la vie vous habite à nouveau. Mais tout le monde vous croit encore plongé dans la pénombre. Pire, tout le monde vous condamne.

A la suite d'un malaise, Angèle Lieby est transportée aux urgences de l'hôpital de Strasbourg. Elle s'exprime de plus en plus difficilement, peine à respirer, jusqu'à perdre connaissance. Les médecins la plongent alors dans un coma artificiel pour l'intuber et tenter de comprendre ce qui a provoqué son état. Mais les jours passent, et Angèle ne se réveille pas. Pour le personnel médical, le verdict est sans appel, la jeune femme est considérée comme morte. Pourtant, Angèle est bel et bien consciente, prisonnière de ce corps inerte.

Ce qu'elle va vivre alors ressemble de très près à l'enfer. Traitée comme un corps sans vie, le personnel soignant ne se soucie plus de ses ressentis. Les douleurs qu'on lui inflige sont bien pires que celles qu'elle avait ressenties jusqu'alors. Elle voudrait hurler, se débattre, mais elle ne peut que subir, suppliant intérieurement que ce calvaire prenne fin.

« La douleur est insupportable. Irréelle, indescriptible. Et elle est décuplée par mon impuissance : non seulement je ne peux pas me débattre, mais je ne peux pas même l'exprimer. Je meurs de souffrance et j'ai la discrétion suprême de n'en rien laisser paraître. Pas un cri, pas une grimace, pas même un frémissement. »

Jusqu'à un miracle : une larme.

Angèle Lieby ne cherche pas, avec ce livre, à régler ses comptes, mais bien à attirer l'attention sur cette expérience terrible qu'elle a vécue, d'alerter les soignants afin qu'aucun autre malade ne subisse à son tour de telles souffrances. Elle se veut porte-parole de ceux qui, comme elles, ont été ou seront un jour dans la même situation de vulnérabilité qu'elle. Pour que tout cela n'ait pas servi à rien. Pour que l'on s'interroge quant à la légitimité d'un diagnostique aussi brutal et catégorique à peine quelques heures après le moment auquel elle aurait dû se réveiller. Pour que l'erreur ne se reproduise pas.

Elle raconte avec beaucoup d'émotion ces instants de profonde solitude et de souffrance indicible, ce combat mental pour que la vie triomphe, mais aussi le retour difficile à l'autonomie, la nécessité de réapprendre à respirer, sans machine. « Ce ne sera pas simple de redevenir moi. »

Un témoignage aussi bouleversant que nécessaire, et une très belle leçon de courage.


Mélina Hoffmann

Chronique publiée dans le BSC NEWS MAGAZINE de Septembre 2013.

30 sept. 2013

Ton sourire sur mes lèvres ?

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Il est des sourires, comme ça, auxquels on aimerait secrètement mêler nos lèvres. Des sourires qui ne disent pas tout, qui laissent entrevoir juste... Des sourires auxquels on ne s'attendait pas et qui nous rendent soudain friable, nous mettent à nu sans un seul geste. Des sourires que l'on aimerait figer dans un souffle, un effleurement léger. Des sourires qui arrêtent le temps et nous agitent au-dedans.

Des sourires auxquels on aimerait dire "Reste...", du bout des lèvres.

Comme ces regards que l'on cherche  et qui, lorsqu'ils nous trouvent au même instant, nous font perdre pied. Nos douze ans, juste là. Et ce fameux contrôle que l'on croyait avoir... Foutaises. Quand ces sourires-là viennent nous caresser le cœur, on ne contrôle plus rien, les protections s'effondrent, le cœur s'emballe, le corps frissonne, le sol tremble sous nos pieds.

C'est effrayant. C'est doux. Ça ressemble à une promesse.



Il est des sourires, comme ça... Des sourires comme le tien.

Mélina, Septembre 2013.

28 sept. 2013

'Secrets de femmes - A cet instant de l'autre', de Nathalie Cougny


« Une femme meurt tous les trois jours en France sous les coups de son conjoint. »

Si ce chiffre reste beaucoup moins élevé que dans d'autres parties du monde, il n'en demeure pas moins affligeant, révoltant, inacceptable. Surtout si l'on considère que, si la violence conjugale connaît une issue dramatique pour un certain nombre de femmes, beaucoup d'autres subissent les coups et le harcèlement moral de leur conjoint, parfois sans que cela ne soit visible de l'extérieur. Pour ces femmes, ce n'est plus de vie dont il est question, mais de survie. La plupart d'entre elles se taisent. Seules 10,6% portent plainte.

Toutes, pourtant, sont profondément abimées quand elles ne sont pas complètement détruites, prisonnières d'un mal-être qui les ronge et bouleverse leur rapport au monde. 

Nathalie Cougny donne la parole à quelques-unes de ces femmes blessées, bafouées, à jamais marquées dans leur chair et leur âme par une relation – souvent longue - avec un homme violent. Pour certaines, l'état des lieux est toujours difficile à faire, même après plusieurs années. Les séquelles sont réelles, le rapport à l'autre et à l'amour inévitablement transformés, l'estime de soi rarement intacte, la reconstruction difficile. Leurs témoignages sont touchants, douloureux, sincères. Toutes s'interrogent sur leur incapacité à aimer et à être aimée, à faire à nouveau confiance à un homme.

« Mais cette histoire de 17 ans m'a brisée dans les profondeurs de l'amour, elle a dévié les chemins, elle a fracturé mes certitudes, défait à jamais les mailles de la confiance pour un homme. Je cherche un amour absolu qui  n'existe pas, un amour qui délivre constamment des preuves d'amour par peur d'être trahie, trompée, bafouée. »

Au-delà de ces témoignages poignants, l'auteur nous informe, nous alerte sur la place des femmes dans le monde et les discriminations dont elles font l'objet dans de nombreux domaines. Des chiffres tirés de divers rapports qui font froid dans le dos et qui interrogent. Ainsi, un rapport de 2007 de l'UNICEF révèle que si les femmes accomplissent 66% du travail mondial et produisent 50% de la nourriture, elles ne perçoivent en retour que 10% des revenus et 1% de la propriété. Et ce n'est qu'un exemple... 

La violence faite aux femmes est une réalité non négligeable et pourtant l'un des crimes les moins poursuivis. Comment expliquer que la société ferme les yeux face à un tel phénomène ? Pourquoi cette nécessité de l'homme d'avoir une emprise sur la femme ? Une prise de conscience est nécessaire pour lever les tabous et permettre aux femmes et aux hommes d'avancer enfin conjointement, sans supériorité ni domination de l'un sur l'autre.

Le chemin à parcourir est encore long, mais chacun d'entre nous peut apporter sa pierre à l'édifice en se faisant l'écho des cris du cœur de ces femmes aux destins brisés.


Mélina Hoffmann
Chronique publiée dans le BSC NEWS MAGAZINE de Septembre 2013

11 août 2013

'Ne la quitte pas des yeux', Linwood Barclay




« Mon idée du bonheur ? Trois jours de pluie, un frigo bien rempli et le nouveau Linwood Barclay.»
Stephen King

David Harwood est journaliste local dans la ville de Promise Falls où il vit avec sa femme Jan et son jeune fils Ethan. Jan déprime depuis plusieurs semaines, aussi lorsqu’elle propose une virée en famille au parc d’attraction de Five Mountains réputé pour ses montagnes russes, David accepte. Cette sortie sera l’occasion pour lui de souffler un peu et pour sa femme de se changer les idées. Une belle journée en famille en perspective.
Mais à peine arrivés sur place, Jan se volatilise. David alerte la police, mais sa femme est introuvable. Enlèvement ? Fuite préméditée ? Suicide ?

Rapidement, et contre toute attente, David devient le suspect numéro 1. Il faut dire que tout l’accable : non seulement rien ne vient confirmer l’état dépressif de sa femme, mais rien même ne prouve qu’elle a mis les pieds avec lui dans ce parc d’attraction ! Pour David, c’est l’incompréhension totale. Fermement déterminé à découvrir la vérité et à retrouver sa femme, il mènera alors sa propre enquête. Mais de surprises en révélations, il se retrouvera face à une réalité qu’il n’aurait jamais envisagée et à une femme qu’il ne connaît pas si bien qu’il le croyait…

Ce n’est pas pour rien que l’on parle de Linwood Barclay comme l’un des nouveaux maîtres du polar !
Malgré une intrigue sans grande originalité et quelques invraisemblances que l’on pardonne volontiers, il signe ici un thriller convaincant et riche en suspense, ponctué de nombreux rebondissements et autres fausses pistes. Tout ce qu’il faut, en somme, pour capter notre attention d’un bout à l’autre, jusqu’à un dénouement surprenant.
Secrets, trahisons, mensonges, drames : tout y est !
Et si de nombreux éléments se laissent deviner assez facilement et peuvent donner l’impression au lecteur d’avoir presque toujours un temps d’avance sur l’histoire, le tout est suffisamment bien mené et rythmé pour que la recette prenne.

Un polar efficace et sans temps mort, qui devrait ravir les amateurs du genre.

Mélina Hoffmann

Chronique publiée dans le BSC NEWS MAGAZINE de Juillet-Août 2013

4 août 2013

'Le manuel du serial killer', Frédéric Mars


« Dans deux ou trois heures tout au plus, ce garçon sera mort. (…) Je vous raconte la suite ? Les cris de la mère qui découvre son petit déjà quasi exsangue. Les hululements de douleur du môme qui se tient le ventre à deux mains. Ses convulsions sur le sol de la cuisine. (…) Alors ? Je vous la raconte ou pas, cette suite ? Non. Je vais plutôt vous parler de moi. C’est ça, de moi seul.  La mort est en moi. Là, dans ma tête. Elle y a toujours été comme chez elle. »
Sombre, prenant, torturé, angoissant, déstabilisant… Les qualificatifs ne manquent pas pour parler du dernier livre de Frédéric Mars !
L’auteur au large univers littéraire n’attend d’ailleurs même pas le début de l’intrigue pour semer le trouble, puisque le titre nous emmène déjà sur une fausse piste !
En effet, il ne s’agit pas là d’un manuel d’apprentissage pour devenir un parfait serial killer, et encore moins d’un livre d’horreur, mais bien d’un thriller psychologique habilement construit !
Et pour nous plonger complètement dans l’ambiance, Frédéric Mars n’a pas hésité à donner à son personnage principal le pseudonyme de l’écrivain créateur du célèbre personnage d’Hannibal Lecter !
Nous voici donc avec Thomas Harris, un brillant étudiant en littératures comparées à l’université d’Harvard, par ailleurs pas très gâté par la vie. En effet, confronté à la mort de ses parents dix ans plus tôt, le jeune homme qui a grandi en foyer souffre du syndrome de Korsakoff qui affecte sa mémoire, et doit également vivre avec un œil blanc et les moqueries dont il fait l’objet. 
Un personnage d’autant plus énigmatique qu’il va se retrouver de façon troublante au cœur d’une terrible affaire !
Tandis qu’il est chargé de trier les ouvrages reçus au service des manuscrits d’une maison d’édition dans laquelle il effectue un stage, le jeune homme se retrouve face à un texte des plus intrigants : Le Manuel du serial killer. Un manuscrit anonyme qui se révèle être un mode d’emploi précis et détaillé pour devenir un parfait tueur en série ! A la fois choqué et fasciné par cette découverte, Thomas décide de ne pas le conserver.
Aussi, la surprise est de taille lorsque, quelques semaines plus tard, le manuscrit apparaît dans la vitrine de toutes les librairies ! Une surprise qui vire aussitôt au cauchemar lorsque Thomas découvre qu’il est publié sous son propre nom ! La descente aux enfers commence alors pour le jeune homme lorsqu’il apparaît que le livre en question fournit les plus petits détails d’une série de meurtres d’enfants qui frappe la région depuis des mois. Thomas clame son innocence, en vain. Tout l’accable.
Qui est à l’origine de cette terrible machination ? Comment ce manuscrit a-t-il pu se retrouver entre les mains de milliers de lecteurs ? Qui en est le véritable auteur et pourquoi le publier sous le nom de Thomas Harris ? Mais d’ailleurs, qui est vraiment Thomas Harris ?
L’intrigue – absolument machiavélique - se tisse d’un bout à l’autre du roman, jusqu’à un dénouement aussi inattendu que déroutant.
Fiction et réalité se frôlent tout au long du livre, flirtent avec la frontière qui les séparent, allant même parfois jusqu’à se confondre.
Présent et passé s’entremêlent de même que différents points de vue narratifs se croisent. Ainsi, le récit à la première personne est entrecoupé de passages du fameux livre publié, ainsi que de retranscriptions de séances entre Thomas et son psychiatre. Difficile de deviner où tout cela va nous mener !
L’auteur brouille sans cesse les pistes, nous plonge dans un brouillard de confusion, nous manipule avec brio et maintient le suspense jusqu’aux toutes dernières pages.
Un thriller diaboliquement prenant qui joue avec nos nerfs !

Mélina Hoffmann

Chronique publiée dans le BSC NEWS MAGAZINE de Juillet-Août 2013

2 août 2013

'Les états d'âme - Un apprentissage de la sérénité', Christophe André

« Les états d’âme sont l’expression de ce grand mélange indissociable de tout ce qui se passe en nous et autour de nous : mélange d’émotions et de pensées, de corps et d’esprit, de dehors et de dedans, de présent et de passé. Ce mélange est évidemment aussi riche que compliqué : impur, unique, labile, toujours recommencé, jamais exactement le même. Comme les vagues de la mer… »

Ils nous bouleversent, nous fragilisent, nous oppressent, nous tourmentent ou nous apaisent...; Ils nous rendent parfois plus forts, souvent plus fragiles et vulnérables ; Ils sont l’essence-même de nos remises en question, influencent nos comportements, viennent régulièrement semer le trouble dans nos esprits lorsqu’ils ne se contentent pas de les inonder d’inquiétude… ; Source de créativité, ils sont parfois nos meilleurs guides vers la sagesse, la sérénité et le bonheur, tandis que - d’autres fois - ils nous en éloignent sans ménagement.
Joie, excitation, curiosité, bonne humeur, mais aussi nostalgie, inquiétude, culpabilité, tristesse, … : nos états d’âme font partie intégrante de nous. Simplement, nous pourrions dire qu’ils nous rendent vivants.
On peut choisir d’en souffrir, de se laisser submerger par eux, ou s’enrichir de leur présence sans les laisser prendre le contrôle de nos vies. Pour cela, il est indispensable de comprendre leurs mécanismes.
A quoi servent les états d’âme positifs et négatifs? ; Faut-il faire une différence entre douleur et souffrance ? ; Pourquoi sommes-nous si inquiets ? ; Comment réguler ses états d’âme d’inquiétude ? ; Existe-t-il des états prédépressifs ?  ; Que faire face aux états d’âme de tristesse; qu’est-ce qu’aller bien ? ; Comment le matérialisme bouscule-t-il nos états d’âme ? ; Vaut-il mieux se libérer de l’espoir ou fuir le désespoir ? ; Peut-on augmenter ses capacités à ressentir du bonheur ? ; Qu’est-ce que la sagesse ? ;…

Christophe André, médecin psychiatre et psychothérapeute, apporte - dans cet ouvrage à la fois scientifique et chaleureux - des réponses claires et détaillées à toutes ces questions, et à bien d’autres encore.  Selon lui, il est indispensable de ne pas nier l’existence de ces mouvements de l’âme, d’accepter de les laisser passer en nous sans les laisser s’enraciner et nous perdre ; de les observer, les comprendre, et surtout d’apprendre à les réguler. En effet, fuir ou tenter d’éradiquer nos états d’âme peut donner lieu à de nombreuses souffrances, et même à des comportements pathologiques tels que la boulimie ou tout autre type d’addiction dans laquelle, par automatisme, nous finirons par nous réfugier à chaque approche d’un état d’âme douloureux.  « On s’est juste rendu dépendant d’une manière de réguler ses états d’âme en achetant quelque chose, en consommant des biens. Une manière peu efficace et coûteuse de prendre soin de soi : remplir nos cerveaux de vide, nos estomacs de saletés et nos armoires d’inutilités, pour pallier les fluctuations de nos états d’âme. »

Certains de ces états d’âme peuvent d’ailleurs être appréhendés plus sereinement si l’on s’efforce de les  considérer comme des opportunités, à condition toutefois de ne pas leur donner trop d’importance. 
« La tristesse est un sentiment envahissant, qui occupe l’entièreté de notre âme. Quand on est triste dans sa tête, tout devient triste en nous : notre regard, notre démarche, le timbre de notre voix. Par contre, il n’est pas toujours si douloureux d’être triste, car il y a quelque chose de spécifique à la tristesse : la douceur. […] La tristesse est sans doute une des bases les plus fécondes pour notre vie intérieure, tant elle semble pouvoir donner du relief, de la douceur, du poids à tous nos autres états d’âme. »

Dans une société qui prône la consommation comme remède à tous nos maux, difficile parfois de se souvenir que l’essentiel se trouve en nous et que, plus nous remplissons notre existence, moins nous l’habitons. Les difficultés, les épreuves, font partie inhérente de nos vies. C’est en l’acceptant et en ne les considérant pas systématiquement comme des drames que nous pourrons gérer aux mieux ces situations, sans laisser s’installer des états d’âme toxiques qui auraient pour effet de nous centrer davantage sur le problème en lui-même que sur sa solution. Un cheminement que nous invite à suivre l’auteur à travers les nombreux chapitres de ce livre richement documenté.
Un ouvrage passionnant, accessible à tous, qui nous invite à devenir plus attentifs à ce qui se passe en nous, à la manière dont nous raisonnons, à notre perception du monde qui nous entoure ; à renouer avec nos sens, ou encore, à faire de la compassion notre meilleure alliée, pour ne jamais - ou presque ! - perdre le contrôle de nos états d’âme.

Mélina Hoffmann

Chronique publiée dans le BSC NEWS MAGAZINE de Mars 2010

6 juil. 2013

'Purgatoire des innocents', Karine Giebel


« Je croyais avoir trouvé le refuge idéal. Je viens de mettre les pieds en enfer. »
Paris, place Vendôme. Un braquage qui tourne mal. Raphaël, à peine sorti de prison, son frère William et deux autres complices viennent de dérober quelques trente millions d’euros. La police intervient, des coups de feu retentissent, une passante et un policier perdent la vie tandis que William est grièvement blessé. Les malfrats parviennent néanmoins à prendre la fuite avec leur butin et se mettent en quête d’une planque.
Ils croisent alors la route de Sandra, une jeune vétérinaire que William prend en otage et contraint à les héberger ainsi qu’à soigner son frère. La menace est claire : « Il meurt, tu meurs. »
Reclus dans cette propriété isolée en pleine campagne, les braqueurs se sentent à l’abri. Le mari de Sandra étant absent pour plusieurs jours, la situation est sous contrôle. Une fois que William aura repris suffisamment de forces, ils reprendront la route et iront au bout de leur plan. C’est en tout cas ce qu’ils croient. Mais alors qu’ils pensent avoir laissé le pire derrière eux, ils sont loin de se douter qu’ils viennent de mettre les pieds au cœur-même de l’enfer…
Si l’expression « à couper le souffle » avait été inventée pour qualifier un livre, nul doute qu’elle l’aurait été pour celui-ci ! Difficile de trouver polar plus terrifiant ! L’histoire démarre sur les chapeaux de roue et ne cesse de gagner en intensité. Karine Giebel ne nous laisse pas une minute de répit, aussi préparez-vous à une nuit blanche si vous entamez la lecture un soir.
La tension ne retombe à aucun instant, pas même une fois le livre refermé. L’angoisse et le suspense sont à chaque page, à la limite parfois de l’insoutenable. Quand on croit être au cœur de l’horreur, l’histoire prend alors un tournant et nous plonge dans quelque chose de pire encore et on se demande jusqu’où l’auteur va nous emmener ainsi. On hésite à reprendre notre souffle. Certaines scènes se révèlent particulièrement violentes et éprouvantes, d’autant que les descriptions sont d’une précision telle qu’elles invitent inévitablement à la visualisation.
La psychologie des personnages est elle aussi finement travaillée, notamment à l’aide de flashbacks réguliers qui nous aident à comprendre l’évolution de chacun d’entre eux et le moment, peut-être, où tout a basculé. On éprouve de la compassion, parfois même un attachement inattendu pour certains d’entre eux que l’on se préparait pourtant à détester.
Des personnages tous ici confrontés à un même défi : lutter par tous les moyens possibles et imaginables pour leur survie. Y parviendront-ils ? Et à quel prix ?  
Karine Giebel joue avec nos nerfs à merveille et nous offre un polar particulièrement efficace qui mériterait amplement une adaptation cinématographique.
Âmes sensibles s’abstenir. Ce livre vous captivera, vous remuera, vous hantera.

Mélina Hoffmann

Chronique publiée dans le BSC NEWS MAGAZINE de Juin 2013

24 juin 2013

'Animal emotion', Kyriakos Kaziras


« Mes photographies d’animaux peuvent donner l’impression de revêtir un côté extrême – à cause de la nature dite « sauvage » des animaux qui retiennent mes choix, à cause des destinations qui m’intéressent, qu’elles aient un caractère exotique, équatorial ou polaire, à cause de la très faible distance à laquelle je m’approche d’eux, de cette adrénaline que me valent ces prises de vue. Tout cela est vrai, mais le caractère « extrême » de mes images, l’intensité qu’elles renferment, du moins je l’espère, réside dans le regard croisé, celui de la bête et du photographe. »
Kyriakos Kaziras est photographe animalier professionnel. Passionné depuis toujours par la photographie et les voyages, il sillonne le monde, son appareil photo à la main, à la recherche d’instants rares et précieux que son objectif pourra immortaliser. Dans ce magnifique ouvrage, il nous emmène au plus près de la faune sauvage et nous livre des images fascinantes, d’une proximité troublante avec l’animal, toujours photographié en liberté.
Au gré de ses périples à travers l’Afrique du sud, l’Inde, l’Alaska ou encore l’Equateur, il nous fait partager ses rencontres avec des hippopotames, gorilles de montagne, léopards, ours polaires, tigres du Bengale, lions, éléphants ; avec un crabe rouge ou encore un colibri à ailes saphir, saisissant une expression, une émotion au plus profond du regard de l’animal.
Ses photos sont d’une intensité remarquable, certaines réellement bouleversantes, et il émane de chacune d’elles une humanité aussi surprenante que troublante.
Un album épuré qui rend un bel hommage à la faune et la flore sauvages à travers le regard d’un photographe dont le talent n’a d’égal que l’intensité de sa passion.
Un livre à offrir, à s’offrir, et à savourer avec toute l’attention qu’il mérite.

Mélina Hoffmann

 Chronique publiée dans le BSC NEWS MAGAZINE de Juin 2013

3 juin 2013

'Les proies - Dans le harem de Kadhafi', Annick Cojean



Elles sont des centaines à avoir connu pour une nuit, une semaine, une année, parfois davantage, les coups, viols et autres perversions d’un tyran insatiable et brutal, souvent sous l’emprise de drogues ou d’alcool.
Durant ses 42 années passées au pouvoir et jusqu’à sa mort en octobre 2011, Mouammar Kadhafi s’est proclamé le défenseur des femmes dans une Lybie entièrement régie par des hommes. Pourtant, dans sa résidence fortifiée de Bab al-Azizia, le dictateur séquestrait des jeunes femmes, des jeunes filles, préalablement repérées par ses rabatteuses - dans les écoles, universités, prisons, salons de coiffure, de beauté, et même dans les mariages - qu’il contraignait ensuite par le chantage ou la force à devenir ses esclaves sexuelles. De jeunes hommes aussi, parfois, lorsqu’il ne tentait pas de s’attirer les faveurs d’actrices, femmes ou filles de ministres, ou encore d’épouses de chefs d’Etat africain en leur offrant de somptueux cadeaux.
« Le sexe était monnaie d’échange, moyen de promotion, instrument de pouvoir. Les mœurs du Guide se révélaient contagieuses. Sa mafia opérait de la même manière. Le système était corrompu jusqu’à la moelle. »
Annick Cojean est journaliste et écrivain. Lors d’un reportage à Tripoli sur la contribution des femmes lors de la Révolution en Lybie, elle a rencontré Soraya, une jeune femme de 22 ans dont le témoignage poignant et terrifiant nous est rapporté dans ce livre choc. Soraya avait à peine 15 ans lorsqu’elle a été repérée lors d’une visite de Kadhafi dans son école et enlevée le lendemain. Le début de l’enfer pour cette jeune fille qui, comme beaucoup d’autres choisies pour satisfaire la consommation quotidienne du Guide, se verra voler sa virginité, son enfance, ses rêves, et toute perspective d’avenir dans la société lybienne.
Ses confidences, livrées avec une grande sincérité, font froid dans le dos tant elles révèlent la violence, l’humiliation et la cruauté dont ont été victimes dans la plus totale impunité nombre de femmes, certains sévices les obligeant parfois à passer directement de la chambre de Kadhafi à l’hôpital pour soigner des blessures internes.
Annick Cojean, qui a reçu le Grand Prix de la Presse internationale par l’APE – Association de la Presse étrangère – pour l’ensemble de son œuvre sur la Lybie, évoque néanmoins la difficulté de mener une telle enquête dans une société où le viol – et plus généralement la sexualité – sont aujourd’hui encore des tabous. Si quelques-unes des victimes du dictateur ont accepté de se confier à la journaliste, la plupart se réfugient dans le silence, et toutes vivent dans la terreur.
« Sa révolte est la mienne. Et j’aurais bien voulu aussi la partager avec d’autres Lybiennes : magistrates, avocates, proches du CNT, défenseuses des droits de la personne. Aucune, hélas, n’en fera pour l’heure son combat. Trop sensible. Trop tabou. Rien à y gagner. Tout à y perdre. Dans un pays entièrement entre les mains des hommes, les crimes sexuels ne seront ni débattus ni jugés. Les porteuses de messages seront  décrétées inconvenantes ou menteuses. Les victimes, pour survivre, devront rester cachées. »
Annick Cojean lève un peu plus le voile sur les coulisses d’un régime aux nombreuses complicités au-delà même des frontières de la Lybie, qui faisait de la violence et du sexe ses armes de pouvoir et de pression.
Ce livre, qui arrivera en Lybie en fin d’année, mériterait une très large lecture. Bien que l’on reste un peu sur notre faim quant aux explications sur les rouages de ce système et au devenir de ces femmes, on dévore avec autant d’intérêt que d’effarement l’enquête de la journaliste ainsi que le récit des témoignages souvent crus de Soraya et quelques autres jeunes victimes de ce prédateur au sadisme sans borne. Car c’est bien là que la confession de Soraya trouve sa motivation principale : donner voix à toutes ces souffrances silencieuses, et aider à ce que ces femmes aux vies saccagées et souvent rejetées par leurs propres familles, soient enfin considérées comme des victimes. Et que le monde ouvre les yeux, enfin. Il semblerait que le chemin soit encore long, mais la démarche est à féliciter et à soutenir.
Une lecture qui frôle parfois l’insoutenable mais instructive et terriblement nécessaire.
Mélina Hoffmann

Chronique publiée dans le BSC NEWS MAGAZINE de Mai 2013